Le traitement de l'information chez l'enfant autiste

« D’une certaine manière, je suis mal équipé pour survivre dans ce monde, comme un extra-terrestre échoué sans manuel d’orientation ». Jim Sinclaire est atteint d’autisme et évoque sa difficulté de comprendre le monde dans lequel nous vivons. (1)

La vie nous arme à nous organiser dans notre quotidien, et ce dès notre naissance. On apprend un certain rythme (repas, sommeil…), certaines habitudes de vie (dormir dans la chambre, s’habiller dans la salle de bain, manger à table…). En grandissant, on apprend à se repérer dans notre environnement. On sait de quoi sera faite notre journée, notre semaine. Puis vient l’acquisition des notions temporelles, qui vont permettre d’anticiper sur leurs activités, de gérer leur temps, avec notamment l’aide de l’agenda en classe. Avec l’âge, on ne subit plus l’environnement mais on le contrôle. (1) (2)

Chez les enfants autistes on n’observe pas ce même mode de fonctionnement. Ils ont des grandes difficultés à donner du sens au monde qui les entoure.  Cela est dû notamment au traitement spécifique de l’information. Dans ce domaine plusieurs hypothèses sont émises :

•       Un problème dans la saisie de l’information (2)

Comme nous l’avons vu précédemment l’intégration des informations sensorielles est perturbée. Les signaux en provenance des canaux sensoriels sont atténués ou exagérés et « ces distorsions, ainsi que le défaut de liaison entre ces informations donnent un caractère incohérent à l’environnement et contribuent à le rendre imprévisible et angoissant. » (2) Exemple : Un enfant qui mange un gâteau, peut refuser de manger le même gâteau si sa forme a changé ou si celui-ci à une texture un peu différente.

•       Un problème d’intégration des informations (2)

Plusieurs hypothèses dans le déficit d’intégration de l’information sensorielle :

•    Trouble de la cohérence centrale

Dans les expériences d’Uta Frith en 2006, elle émet l’hypothèse que « dans l’autisme la faiblesse de la cohérence centrale pouvait rendre compte de difficulté d’intégration fonctionnelle de l’information. » L’enfant focalise son attention sur des détails. Il a donc une approche fragmentée de l’information entravant une intégration globale qui permet de donner du sens. Cela rend son environnement instable. (2)

•    Déficit de la théorie de l’esprit

« Avoir une théorie de l’esprit c’est être capable d’attribuer des états mentaux indépendants aux autres et à soi-même pour expliquer et prédire le comportement. L’individu ne peut ajuster son comportement qu’en accèdent à la représentation de ce que son partenaire sait, pense, ressent ou croit. »  (2) C’est vers l’âge de 4 ans qu’on assimile cette notion de fausse croyance et d’en tenir compte dans notre raisonnement. Chez les enfants autistes, cet aspect déficitaire rend la compréhension des états mentaux difficile et permet d’expliquer leur handicap social.  Exemple : l’enfant autiste ne comprend pas l’ironie ou le deuxième degré…

•    Troubles des fonctions exécutives

Elles correspondent aux capacités qui sont nécessaires à une personne pour s’adapter à des nouvelles situations. On retrouve notamment la flexibilité (ce qui permet l’arrêt d’une activité pour passer à une autre), la mémoire de travail (ce qui permet de retenir des informations à court terme et d’y effectuer une opération cognitive de l’information), l’inhibition (qui permet d’inhiber une réponse automatique non adaptée), la planification (ce qui permet d’organiser les activités) et l’attention (ce qui permet de rester concentrer sur une tâche).  Les troubles des fonctions exécutives chez les enfants autistes peuvent être à l’origine des problèmes d’adaptation (rigidité d’adaptation) et entrainent donc des difficultés dans la vie quotidienne. (2)

Ces hypothèses sont des pistes pour comprendre le fonctionnement des enfants autistes, mais les difficultés de compréhension de notre environnement sont bien là. Il est donc primordial d’intervenir dans ce domaine pour leur permettre la meilleure qualité de vie possible.

Bibliographie :

1. Willaye E, Blondiau M-F, Bouchez M-H, Catherine S, Descamps M, Glace A, Moro B, Ninforge C. Manuel à l’intention des perants ayant un enfant présentant de l’autisme : éduquer, c’est amener à l’autonomie. Grasse: A.F.D; 2008.

2. Rogé B. Autisme, comprendre et agir. 2ème ed. Paris: Dunod; 2008.